All bark, no bite ?

La démission du conseiller à la sécurité nationale Michael Flynn plonge certains commentateurs qui plaçaient beaucoup d’espoir dans la présidence Trump dans un profond désarroi. Il est vrai qu’il était l’un des architectes de la nouvelle politique étrangère de l’administration entrante. Mais, qui pouvait croire qu’il serait facile de reprendre la main sur une politique étrangère solidement ancrée depuis une trentaine d’années ? L’équipe entrante a frappé d’entrée en voulant réorganiser le Conseil de Sécurité Nationale. Plus concrètement, c’est maintenant le président ou le vice-président qui décide si la présence du Chef d’État Major des Armées et du Directeur du Renseignement National est requise au Conseil de Sécurité. Cela signifie, entre autres, que la CIA, agence indépendante qui est malgré tout chapeautée par le DRN en cette circonstance, peut-être dorénavant court-circuitée du CSN.

Bien sûr, le contrôle du renseignement – ou intelligence en anglais – est crucial puisque ce sont ces services qui disent ce qui est et ce qui n’est pas en la matière, que ce soit faux ou vrai. Et on connaît les caviardages et mensonges dont ont été coutumiers les services américains depuis quelques années ; de même que le parti pris pro-Clinton de la CIA lors de la campagne présidentielle.

La réplique des services de renseignement ne s’est pas faite attendre longtemps, autant pour défendre leur autonomie de décision que pour contrecarrer la politique d’apaisement avec la Russie voulue par la nouvelle administration. Cela signifie qu’il sera impossible d’impulser une nouvelle politique étrangère avant d’avoir repris un contrôle ferme des divers services de renseignement. Il serait absurde de purger entièrement tous les services, sinon ceux-ci ne pourraient plus fonctionner. Mais, comme lors de tout changement majeur de politique d’un pays, il suffit en général de contrôler les postes clés pour que le reste des fonctionnaires – l’intendance pour employer un terme gaullien – suive. Tous les fonctionnaires des administrations nazi, soviétique, fasciste, franquiste, vichyste, etc. n’ont pas été intégralement virés une fois ces régimes tombés et ont continué à constituer l’ossature des nouvelles administrations.

Cela ne signifie donc pas que c’est impossible. Et visiblement, Donald Trump et son entourage semblent vouloir s’atteler à la tâche puisqu’ils souhaiteraient nommer Stephen Feinberg pour auditionner lesdits services d’intelligence.

C’est une lutte acharnée pour ceux qui, au sein de ces services, et même à l’extérieur, refusent la réorientation de la politique étrangère de la présidence Trump. Leur ligne d’attaque visera cette politique de détente. Que ce soit sur le terrain en cherchant à intensifier les combats en Ukraine ou en Syrie, ou en attaquant Donald Trump sur ses liens supposés avec la Russie dans le but de le destituer. Les médias génériques ne seront pas en reste pour jeter de l’huile sur le feu. Il n’est donc pas anormal pour la nouvelle présidence de faire preuve de la plus grande prudence et accessoirement d’éviter d’être entraînée dans la chute de Michael Flynn en acceptant sa démission. D’où la nécessité aussi, de reprendre peu à peu la main sur les fonctionnaires de l’État fédéral américain, histoire de pouvoir placer des fusibles à des niveaux moins élevés.

On aurait beau jeu de choisir la neutralité d’un Glenn Greenwald et de déclamer en chœur avec les médias génériques, que Donald Trump appréciait les lanceurs d’alertes quand il était dans l’opposition mais beaucoup moins maintenant. Cette neutralité journalistique est tout à fait honorable. Mais, il y a quand même une différence qu’il ne faut pas oublier de mentionner, les Snowden et Manning l’ont fait en trahissant leur service (NSA) et donc en prenant le risque d’avoir toute la puissance de coercition de ces services aux trousses. Ceux d’aujourd’hui, le font protégés au sein même de ces services.

Il se dit que c’est dans la difficulté que se révèle le caractère de chacun. Il me semble prématuré d’abandonner tout espoir de changement de politique étrangère américaine avant même que Donald Trump ait cessé d’aboyer ou même essayer de mordre. Au fond, personne d’autre que lui-même ne peut dire s’il en est capable.

MAJ : 18/2/2017

Le beau Danube bleu de Johann Strauss II par l’Orchestre philharmonique de Vienne.

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